Dans le monde ultra concurrentiel de la distribution alimentaire, les différents acteurs tentent donc de se démarquer aux yeux des consommateurs à travers diverses innovations (drive classique ou piéton, livraison collaborative, robot autonome…) sur le marché des courses en ligne.
Si le commerce des courses en ligne connaissait déjà un grand bond en avant de son activité, c’était sans compter sur la crise sanitaire du Covid-19 qui a impulsé aux consommateurs de nouveaux comportements d’achats en privilégiant ainsi le web-commerce.
Entre fermeture des centres commerciaux, confinement, couvre-feu et limites de déplacement : comment la pandémie mondiale a-t-elle impacté ce marché déjà porteur ?
Zoom sur l’évolution des tendances du E-Commerce alimentaire avec la livraison à domicile, le drive et l’achat en ligne des produits du quotidien.
Comment a évolué le marché des courses en ligne ?
L’année 2017-2018 a marqué le premier tournant du e-commerce alimentaire et des courses en ligne.
D’abord effectif pour les secteurs de l’habillement, de l’électronique, du tourisme ou même de la décoration (représentant à eux tous déjà plus de 50% du E-Commerce en France d’après le Baromètre du E-Shopper réalisé par DPD) ; le e-commerce s’est rapidement fait envahir par des centaines de marché différents et le commerce alimentaire se place donc à la 11ème et 13ème position des achats en ligne réalisés par les français en 2017. Les experts estimaient déjà en 2018 que le taux d’adoption de ce comportement d’achat pourrait doubler dans les 5 ans (sans même l’anticipation de notre crise actuelle).
Après une croissance spectaculaire ces dernières années, le drive s’essouffle-t-il en France ?
Toujours pas ! Pourtant, il y a encore une dizaine d’années, l’idée même de commander ses courses en ligne n’effleurait pas l’esprit des consommateurs ni même des acteurs du marché. C’était sans compter sur l’entrée d’Amazon Prime Now qui a donné l’élan à la révolution numérique de ce secteur, accélérant alors la mue digitale des distributeurs français.
Les acteurs du commerce alimentaire français ont donc dû mettre la main à la pâte pour concurrencer le leader du E-Commerce, Amazon, voyant leurs chiffres d’affaires dégringoler sur le marché physique au profit des achats de courses en ligne.
Le E-Commerce attire de par ses nombreux avantages (visibilité, image, réduction des coûts d’exploitation, nouveaux clients, communication digitale etc.) ; ainsi, Carrefour, groupe français du secteur de la grande distribution et pionnier du concept d’hypermarché, a alors investi près de 3 milliards d’euros sur 5 ans dans l’objectif de réaliser 20% de son CA en ligne et devenir le leader du E-Commerce alimentaire.
Ses concurrents ont alors suivi ce mouvement et sont entrés en jeu : Monoprix, Franprix mais aussi Leclerc, à travers des solutions pour réaliser ses courses en ligne : livraison, click and collect et drive.
A l’ère de la digitalisation et de l’ultra-personnalisation, proposer un panel de solutions couvrant l’ensemble des canaux, des parcours clients, et ce, avec une zone de chalandise presque sans limite est devenu une obligation pour le secteur de l’alimentaire.
Face à un consommateur de plus en plus mature et de plus en plus exigeant, il a fallu bousculer les habitudes de consommation et créer de nouveaux réflexes d’achat en misant sur la conjonction des deux canaux : physique et digital, et avec une offre de service diverse : courses en ligne, drives, click and collect, livraison express, livraison j+1 etc…
Quels sont les chiffres du marché des courses en ligne ?
En 2019, on comptait plus de 40,5 millions d’internautes, soit 70 % des Français, ayant effectué des courses en ligne au cours du 3e trimestre 2019, d’après l’Observatoire des usages Internet de Médiamétrie, une progression de 4,4 % sur un an. Une tendance directement liée aux nouvelles technologies qui changent notre façon de consommer et rendent l’achat en ligne plus pratique, plus rapide et plus écologique. On a alors vu apparaître des dizaines de nouveaux moyens de paiement, des tickets de caisse dématérialisés, des drones livreurs et autres robotique, les assistants vocaux et le V-Commerce… Ainsi, en 2019 Le drive a généré 6,8 Mds € de chiffre d’affaires dont 25% du CA réalisé sous promotion et comptabilise 5 205 points de vente (+13,6% depuis 2018).
C’est d’ailleurs un des circuits de distribution qui progresse le plus avec 445 ouvertures sur 2018 et un nombre de drive supérieur à 5000 en France. Le CA du drive devrait d’ailleurs encore augmenter chaque année de plus de 10% et dépasser les 8 milliards d’euros dans les prochaines années.
Le temps passé à faire ses courses en ligne via le drive diminue mais reste relativement long par rapport aux autres circuits : 22 minutes en 2016 (vs 26 minutes en 2015). Cela s’explique par le fait que les utilisateurs du drive sont plus détendus derrière leur écran qu’en magasin et passent plus de temps à lire les informations sur les produits. D’autre part, un tiers des commandes de courses en ligne sont effectuées sur téléphone, d’où l’importance de proposer soit une application soit un site responsive design pour ne pas réduire davantage la visibilité des produits.
Une tendance surgit cependant : la livraison continue certes de progresser mais séduit relativement moins les français. En effet, la livraison à partir d’une commande de courses en ligne ne génère que 800 millions d’euros de chiffre d’affaires, soit 8 fois moins que le drive. En cause ? Le prix surtout ! Le service est trop cher pour 53% des interrogés par l’étude Segments (mais certains français ont eu une idée pour réduire les coûts de leurs achats : les achats groupés).
Toutefois, en 2018, 38 % des ménages commandaient déjà des produits de tous les jours pour se les faire livrer à domicile générant ainsi un chiffre d’affaires de 4.5 milliards d’euros. Cette tendance s’est progressivement accentuée : au premier trimestre 2020, 60 % des consommateurs ont opté pour cette nouvelle façon de consommer. En outre, les prestations fournies sont exemplaires : la chaîne du froid est respectée et les aliments sont triés par catégorie.
Mais la « menace Amazon » de la grande distribution avec une offre et un service de livraison ultra compétitif pousse les entreprises de l’alimentaire à investir en recherche et développement pour améliorer les coûts de la logistique de la livraison (ils s’équipent alors d’entrepôts géants, de plateformes de préparation de commandes etc.).
Le nombre de références est suffisamment large pour satisfaire tous les consommateurs, en moyenne 10 000, et la croissance du secteur des courses en ligne reste suffisamment forte pour offrir une rentabilité satisfaisante.
Quelles enseignes proposent ce service ?
Différentes enseignes sont présentes sur le marché des courses en ligne et proposent la livraison à domicile ou le drive. On retrouvera dans un premier temps les grandes enseignes d’hypermarché comme Leclerc, Carrefour, Intermarché etc. et certains magasins plus petits des centres urbains comme Monoprix ou encore G20.
Mais des enseignes du E-Commerce viennent se placer en important concurrents comme c’est le cas d’Amazon qui offre maintenant les services de livraison à domicile dans l’alimentaire. De quoi faire trembler les plus grands acteurs de l’alimentaire en bousculant des codes pourtant établis.
Qu’est-ce qui poussent les consommateurs à consommer en ligne ?
Aujourd’hui, on fait nos courses en ligne : allongé sur le canapé, dans la rue en promenant notre chien, au bureau à notre pause midi… On choisit quand est-ce qu’on va venir récupérer nos paniers, et si on n’a pas envie de se déplacer on peut faire venir directement le panier à nous en choisissant la date et l’heure ! Alors que la première solution du commerce des magasins physique s’est déjà grandement développée au fil des années, la solution 2.0 devient de plus en plus une solution de premier choix pour les clients et enseignes d’alimentation.
Bien que les français continuent de favoriser les achats dans les supermarchés physiques, selon une étude Yuseo, 48% d’entre eux trouvent la solution du drive attractive pour gagner du temps et de l’argent (ils sont en effet 34% à faire moins d’achats compulsifs et donc moins de dépenses lors de leurs achats de courses en ligne, moins influencés par le packaging, merchandising ou même les odeurs. Ce sont donc seulement 6% d’achat d’impulsion effectués en ligne contre 22% en magasin). D’autre part, la gratuité du service, la flexibilité des horaires pour récupérer les commandes et la presque disparition des files d’attente sont d’autres critères particulièrement attractifs des clients.
Mais les utilisateurs du drive et / ou des services de livraison sont devenus très exigeants, leurs attentes sont très importantes : ils ne supportent pas les ruptures de stock et seulement 48% d’entre eux achètent des produits de substitution. Ils veulent un large choix de produits et de marques, comme en magasin, et ils sont à la recherche de bons plans et préférences personnalisées (65% d’entre eux cliquent sur les bannières de promotion).
Ainsi, ce sont 28% des consommateurs qui déclarent répartir leurs achats entre le site et le magasin selon Yuseo mais pour 73% d’entre eux, ils ne réalisent leurs courses en ligne qu’une fois par mois. Le physique continue en effet de régner sur le marché.
31 % des Français disent effectuer leurs courses en ligne au moins une fois par an, 18 % tous les mois et 8 % au moins une fois par semaine. Interrogés sur les services qu’ils utilisent, 55 % privilégient le Click & Drive (commande en ligne et retrait en voiture via des bornes de livraison), 37 % la livraison à domicile et 23 % le Click & Collect (commande en ligne et retrait en magasin).
En résumé :
- Vous gagnez du temps
- Vous avez la possibilité de comparer plusieurs épiceries sans quitter votre maison
- Vous évitez les achats compulsifs
- Vous n’avez plus à faire la queue à la caisse
- Un vaste choix de produit comme en magasin
Et quand on profite en plus du système de livraison :
- Une livraison très rapide (en quelques heures)
- Une livraison last minute à domicile
Est-il intéressant de se lancer dans le e-commerce du marché des courses en ligne ?
Le E-Commerce présente de nombreux avantages, que ce soit pour les consommateurs comme pour les acteurs du secteur. Mais quels sont également les inconvénients ou limites que peuvent rencontrer les E-Commerçants sur le secteur des courses en ligne ?
Quels sont les avantages du E-Commerce alimentaire ?
D’une part, le E-Commerce permet un achat plus rapide ainsi que la possibilité de toucher un large public sans interruption (disponibilité des sites web 24h/24 et 7 jours/7). Le E-Commerce est de plus en plus flexible et les mises à jour d’expédition rendent la livraison rapide disponible aux clients tout en permettant également de diminuer largement le délai de livraison des commandes.
D’autre part, les entreprises du E-Commerce peuvent facilement atteindre de nouveaux clients sans limite d’espace (le monde entier peut devenir votre zone de chalandise) puisqu’un site E-Commerce n’est pas lié à un emplacement géographique unique. De plus, les marques ont la possibilité d’entrer en contact avec d’importants auditoires pertinents qui sont dans un état d’esprit prêt à acheter. Cela est possible notamment grâce à la publicité sur les médias sociaux.
Par ailleurs, le E-Commerce permet aussi une réduction des coûts d’exploitation puisqu’il n’y a pas besoin de vitrine physique ni d’employés pour la doter en personnel. Généralement, le nombre de personnes sur un E-Commerce est amoindri par rapport à un commerce physique.
Enfin, l’E-Commerce permet de faire vivre une expérience personnalisée grâce à l’automatisation et à l’utilisation des données et proposant par exemple des pages d’accueil spécifique en fonction des données de géolocalisation des clients (on parle de marketing géolocalisé).
D’autre part, l’avènement de la crise du Covid-19 a poussé les consommateurs à adopter de nouveaux comportements de consommation et les courses en ligne sont devenues le nouveau dada des clients. Entre drive, livraison à domicile et click and collect, le marché a connu une fulgurante augmentation de son chiffre d’affaire sur l’année 2020 – 2021 et n’est pas prêt de voir sa croissance diminuer vu les perspectives d’avenir que les autorités sanitaires annoncent (pénurie de vaccin, variants du virus etc.).
Quels sont les inconvénients du E-Commerce alimentaire ?
Puisque vous n’êtes pas face au client, il est plus difficile de comprendre les désirs, besoins, préoccupations et motivations d’achat de vos clients Bien que la récolte de leurs données personnelles permet de leur offrir des produits ou services personnalisés, certains restent méfiants face à ce système.
Il est également possible de recueillir ces données via des enquêtes ou le service clientèle mais cela va demander des coûts et du temps.
Un autre problème peut survenir : les pannes technologiques qui peuvent avoir une incidence sur la capacité à vendre ou entrer en contact avec les clients / prospects. Si le site de e-commerce d’une entreprise est lent, en panne ou indisponible pour ses clients, cela signifie qu’aucune vente ne sera possible et ces pannes et des défaillances technologiques peuvent nuire aux relations avec les clients (qui sont de plus en plus exigeants) et avoir un impact négatif sur les résultats financiers de l’entreprise.
En outre, il arrive que les données liées au stock ne soient pas coordonnées avec les stocks réels en magasin et vous pourriez vous retrouver à ne pas pouvoir servir au client l’intégralité de la commande que celui-ci a passé (provoquant un mécontentement de celui-ci). C’est d’ailleurs une des raisons pour laquelle certains clients continuent de privilégier les commerces alimentaires physiques.
Enfin, le coût de la livraison peut s’avérer élevé et faire perdre en rentabilité à une entreprise (qui la proposerait gratuitement à ses clients), la principale difficulté se trouvant au niveau des derniers km qui sont les plus chers et les plus polluants.
Qu’est-ce que la crise du Covid-19 a eu comme impact sur le marché des courses en ligne ?
Le respect des gestes barrières dû à la crise du Covid-19 a incité les français à changer leurs modes de consommation et privilégier les courses en ligne. En effet, entre confinement, couvre-feu ou encore limites de déplacement, le E-Commerce alimentaire s’est avéré être une aubaine pour les consommateurs et cette nouvelle habitude de consommation devrait s’installer dans la durée selon les experts du milieu.
Si cette tendance de la vente en ligne des produits alimentaires était déjà un marché porteur en croissance, elle s’est considérablement développée avec la crise. On note ainsi qu’en avril 2020 France, le cabinet Nielsen estimait la part de marché de ce secteur à 10% contre un peu plus de 6% par le passé.
Cette popularisation du e-commerce alimentaire s’est ressenti surtout sur la première semaine du confinement quand les hypermarchés sont devenus des scènes de guerres entre consommateurs : pénurie d’œufs, pâtes, papiers toilettes et 2 à 3h de queue aux caisses. Cela à suffit à convaincre les utilisateurs de se reporter sur les courses en ligne via le drive, le click and collect ou la livraison à domicile et a permis au secteur de l’e-commerce alimentaire d’afficher une croissance de 98% de son CA (une montée en puissance à laquelle les industriels ne s’étaient pas préparer et sur laquelle ils ont dû créer toute une nouvelle stratégie pendant ces 2 mois de confinement de mars à mai).
Pour le cabinet Nielsen, ces bons résultats dans le secteur du e-commerce sont amenés à perdurer après la crise, et les chiffres de la vente en ligne devraient se stabiliser autour de 8% à l’avenir. Cette estimation est d’ailleurs confirmée en partie par une étude menée par Criteo Retail Media, dans laquelle 90% des Français interrogés disaient vouloir continuer à faire leurs courses en ligne après le 1er confinement de printemps 2020.
Ainsi, le drive s’installe avec une part de marché qui a frôlé les 8% sur l’année 2020, le e-commerce alimentaire a réalisé une croissance historique. Et le fort déploiement des drives piétons en centre-ville pourrait nuire à terme aux petits commerces de proximité.
Les perspectives des prochaines vagues de contamination, de re-confinement et autres mesures permettent ainsi au marché de maintenir cette croissance pour une durée encore indéterminée.
Quelles évolutions les courses en ligne devraient-elles connaître dans les années à venir ?
En complément de l’offre déjà en place sur les sites e-commerce des courses en ligne, à savoir les entrées standards par gammes de produits (fruits et légumes, hygiène, produits laitiers etc.), le e-commerce alimentaire devrait pouvoir proposer de nouveaux services dans les années à venir en profitant des nouvelles technologies et notamment de l’intelligence artificielle.
Ainsi, entre parcours thématiques en fonction des recettes, découvertes culinaires et régimes alimentaires par association de produits ; l’utilisateur n’a pas fini de développer sa gourmandise et son sens culinaire.
La big data va permettre de repenser la navigation des utilisateurs et enrichir l’expérience client, tout en gardant ses fondamentaux. Dès sa seconde visite un consommateur devrait se voir proposer des suggestions d’achat en fonction de sa commande précédente, de sa typologie (célibataire, en couple, famille nombreuse, etc.), de ses goûts ou encore de ses intolérances alimentaires.
D’autre part, l’alimentaire est un marché à forte récurrence des achats, c’est pourquoi l’expérience e-commerce doit pouvoir se différencier du commerce traditionnel en apportant plus de services et d’accompagnement dans la réalisation de cette tâche qui peut parfois – souvent même – être vue comme une corvée.
Des options comme l’enregistrement des achats récurrents dans l’espace client utilisateur devraient voir le jour et le développement du V-Commerce devrait être encouragé.
Crédit image : Mahmudul Hasan Manik